Éducation positive
Alexandra Dargent

Alexandra Dargent

Formatrice et Superviseur Petite Enfance - Pratcienne R.E.® accompagnement parental

Oula ! L’éducation positive ça va bien 5 minutes !

Quel professionnel petite enfance a déjà entendu ça ? Quel formateur, et superviseur, a déjà eu cette réflexion de la part de professionnels petite enfance ? Combien de grands-parents et parents ont incriminé l’éducation positive face aux chérubins sortant de table quand bon leur semble ? Ou sautant sur le canapé à l’heure de l’apéritif d’anniversaire de mère-grand ?! Combien de parents, pratiquant la pédagogie positive, sont venus à moi en me disant : « Je n’en peux plus ! Je vais craquer ! », « Pourtant ! Je ne comprends pas ? Je suis dans l’éducation bienveillante et ça ne fonctionne pas ! » « Je suis à bout ! »

Éducation bienveillante

Des parents à bout !

Des parents à bout qui me disent : « je vais remettre le cadre ! »

C’est une bonne première réponse je trouve. Car, effectivement, certains parents qui pensent pratiquer une éducation positive sont en réalité, dans une éducation permissive, laxiste.

À vouloir se défaire d’une éducation autoritaire voire totalitaire, subie lorsqu’ils étaient enfants, certains parents passent du côté obscur jusqu’à en oublier certaines règles ! Le cadre et les limites sont essentiels pour aider nos chers bambins à se construire et à grandir en sécurité. Si mon enfant grimpe sur la balustrade du balcon du 5ème étage, je vais immédiatement le rattraper. L’enfant apprend en expérimentant, certes, cependant je suis l’adulte qui le protège et lui assure un cadre sécurisant. L’exemple est fort, néanmoins l’idée que je veux faire passer est là. L’éducation positive n’est pas synonyme d’absence de limites. Au contraire ! si l’enfant ne se sent pas en sécurité avec son parent comment créer la confiance dont il a besoin ?

Pâtes ou nuggets ?

Il en est de même pour les choix. L’éducation positive prône l’écoute des besoins de nos petits anges adorés. Et je suis complètement d’accord ! En revanche écouter les besoins des enfants et s’adapter à ceux-ci (les besoins), cela veut dire pour moi, écouter quand ils nous parlent, regarder quand ils jouent, comprendre ce qui déclenche chez eux telle ou telle émotion. J’entends mon enfant pleurer, je vais le voir et lui demander ce qu’il ressent. S’il n’est pas en âge de parler, je vais nommer à sa place ce qu’il vit : « tu as peur ; tu es triste ; tu es en colère ». Je me câble à mes ressentis et aux émotions de l’enfant. Et je cherche avec lui ce qui a pu déclencher sa peur ou sa colère. En nommant ce qu’il ressent, ce qu’il vit, l’enfant entend qu’il a le droit de ressentir des choses désagréables et qu’il y a un adulte présent pour l’aider à comprendre ce qui le traverse et à chercher une solution avec lui.

En revanche le laisser choisir le repas du soir, c’est sortir l’enfant de son rôle d’enfant, pour lui donner la place de l’adulte. C’est l’adulte qui décide du menu. C’est l’adulte qui fait les courses, c’est l’adulte qui connaît les composants du repas. Que l’enfant puisse choisir entre les coquillettes ou les pâtes alphabet lorsqu’il y a des pâtes, me paraît adapté. Que l’enfant choisisse s’il va manger des pâtes ou des nuggets le soir, me paraît inadapté. C’est donner la place de l’adulte à l’enfant. Et si l’adulte n’est plus aux commandes, l’enfant peut se sentir en insécurité, perdu. Imaginez-vous devant un rayon rempli de pulls de tailles, couleurs et matière différentes. Je vous demande, voire vous oblige, à choisir 1 pull pour vous. Cependant, comme un enfant, vous ne savez pas quelle taille vous faites, vous ne savez pas si vous êtes allergique à une des matières présente dans les pulls, et de plus, toutes les couleurs vous attirent ! angoissant non ? comment choisir quand je suis enfant et que je suis rempli de sensations, pulsions ? comment ne pas être frustré face à ce choix ? et même comment ne pas ressentir de la colère face à cette frustration ?

Les colères, ou les caprices comme les nomme la plupart des personnes, s’expriment majoritairement lorsque l’adulte a élargit le cadre de l’éducation positive jusqu’à ne plus être dans ce mode de relation, d’éducation. Cela devient une éducation permissive où l’enfant n’est plus contenu psychiquement. Une éducation laxiste dans laquelle les enfants font autorité sur leurs parents. Une éducation sans limites, sans règles, où chantages et menaces prennent place ; et également, où les parents en oublient leurs propres besoins. 

Enfant en colère

L'Éducation positive ? Et du coup ? quel est le bon choix ?

Les parents veulent « bien » faire avec leurs enfants. Et il est aujourd’hui, difficile d’ignorer la masse d’informations au sujet de l’éducation positive. Multiples blogs et ouvrages variés sur les règles à appliquer pour une éducation positive efficace, envahissent le net, remplissent les rayons des librairies. Les nouveaux parents croulent sous une multitude de données et se documentent toujours plus afin de devenir des parents parfaits ! quelle angoisse ! quel stress pour ces jeunes parents ! Et si je n’étais pas à la hauteur ? et si belle-maman narguait un « je t’avais prévenu que si tu continues ainsi, un jour il te mangera sur la tête ! » ? Et si les dames de la crèche savaient que je dors avec mon enfant ? dans mon lit ? Horreur !!! 

Les parents qui décident de pratiquer une éducation positive subissent une pression énorme de leur entourage proche ou plus éloigné. Il est certainement plus compliqué pour eux d’être congruents. Comment être persuadé que de dormir avec son tout-petit est la chose à faire de plus adaptée et en même temps le cacher à son entourage, à son médecin, aux professionnels petite enfance, etc… ? Je ne saurais dire quel est le bon choix. Mon choix est sûrement différent du vôtre. C’est peut-être ça le début de la réponse. Se faire confiance en tant que parent, adulte. Se dire que lorsqu’on souhaite adopter une éducation positive, c’est déjà du positif. Et quoi de mieux que le positif pour une relation, pour soutenir et élever nos enfants ?

Le regard et le jugement de l’autre sont certainement les grands coupables de cette dérive de l’éducation positive au laxisme. L’enfant qui est en colère, qui est triste ou qui a peur ; et l’adulte qui écoute et accompagne les émotions de l’enfant, n’est en rien permissif. C’est de l’éducation positive. Je dirais même que c’est de l’éducation, du relationnel. Créer un lien avec son entourage, écouter l’autre pleinement, prendre en considération ses ressentis. Que je sois d’accord ou non n’est finalement pas le plus important. Que je sois en lien et que chacun soit entendu et respecté, l’est.