Lors d’une observation en crèche un été, une professionnelle passe une tête à l’extérieur où se trouvent les enfants et dit « on va manger ». Les enfants ont commencé à manger 32 minutes après. Nous avons bien travaillé avec cette équipe qui n’avait pas conscience de la longueur de ce temps qui, de leur point de vue, passait très vite. Le temps est d’abord un vécu. Elles qui étaient occupées à faire passer tous les enfants aux toilettes, vérifier qu’ils se lavent les mains, aider à trouver une place à chacun avec la chaise adaptée, attacher les serviettes, présenter le menu, apporter le chariot, constituer les assiettes. (et répondre au coup de téléphone d’un papa qui a une question, accueillir l’enfant qui arrive à 11h30, gérer le conflit entre 2 enfants qui veulent le même jeu, aller chercher le froid pour mettre sur la morsure qu’un enfant vient de recevoir, inviter de nouveau et pour la 3ème fois les enfants, qui se sont levés pour les suivre, à se rasseoir…)
Ce temps est vécu tout à fait autrement par les enfants (qui ont faim).
- Certains sont allés s’asseoir à table : pour eux « aller manger = s’asseoir à table »
- Un autre est allé prendre un morceau de pain sur le chariot « aller manger = manger »
- Un autre a poussé ce chariot « aller manger = apporter le chariot »
- Un autre a mordu un enfant « aller manger = croquer » (ou c’était peut-être pour une autre raison)
N’ont-ils pas écouté ? ça peut être le ressenti des adultes. Mais ce n’est qu’un point de vue.
Avec cette équipe nous avons travaillé à développer une meilleure concordance entre ce qu’elles disent et ce qui est observable par les enfants car à moins de 3 ans, il est certain que les enfants sont centrés sur les états, sur ce qu’ils voient. Ainsi, les enfants mettront plus de sens sur les paroles de l’adulte, pourront mieux écouter (s’ils le veulent) et construiront un monde avec plus de sens et plus sécurisant.